vendredi 30 novembre 2018

Schubert - Winterreise | Jonas Kaufmann


La Verne 3: les saisons

     J'ai peu de souvenirs d'automne a la Verne . En cette période je ramassais les cèpes et les oronges dans les châtaigneraies de Collobrières ou je participais aux vendanges dans les vignes de mlle Parcheminey qu' Auguste , son fermier, appelait : Parcheminette !

     En hiver , la Verne charrie d'énormes masses d'eau qui passent avec fracas les nombreuses cascades et retombent en tourbillons dans les gours …
Ce mouvement des eaux , puissant , a façonné les schistes qui composent son lit en créant des formes douces , évoquant parfois la féminité de cette rivière .
En hiver certains endroits ne voient jamais le soleil et dégagent une humidité palpable , sur les sols mais aussi dans l'air respiré .
La seule présence est celle de l'eau car tous les animaux , essentiellement des reptiles , sont plongés dans le sommeil .
On vient alors la visiter cette rivière mais elle vous laisse sur le pas de la porte ; on se sent étranger et assez vite , on la quitte .

     Au printemps , les eaux restent abondantes mais limpides et l'on voit cheminer dans le fond les tortues a la recherche de nourriture ainsi que quelques rares poissons . Certains sont morts durant la sécheresse de l'été , les autres emportés par les crues se sont retrouvés autour de Cogolin ou sont partis visiter leurs amis de St- Tropez !
    Tout autour de la rivière , c'est une explosion de couleurs ; sur les pentes : les cistes , les asphodèles , les bruyères : du rose , du blanc ; au bord de l'eau : les lys martagon rose , les narcisses et la floraison d'une blancheur éclatante des myrtes , des aubépines , des frênes a fleurs qu'on appelle aussi des ornes ; sur les sols un tapis d'anémones , de pervenches et de violettes ponctué de boutons d'or !!!

     On ne peut toujours pas marcher dans le lit de la rivière qui est très froide et certains endroits sont inaccessibles .

     C'est le seul moment où l'on peut saisir et observer de très près une cistude car il leur est difficile dans cette eau claire de se soustraire a la vue . J'ai observé une fois un couple de mâles en train de se battre : coups de griffes et morsures sur les pattes!Les mâles des tortues de terre se donnent de violents coup de butoirs mais il y en a très peu autour de la Verne …

             a suivre

jeudi 29 novembre 2018

Arrau plays Chopin Nocturne in C sharp minor (Lento con gran espressione)


La Verne 2

Dès qu'on s'éloigne du lit de la rivière , qu'on gravit avec peine des pentes abruptes peuplées de chênes-liège et de filarias , de bruyères et d'arbousiers , de genévriers et de cistes : c'est une nature sèche où l'on ne rencontre guère que des couleuvres , lézards et autres reptiles ; un milieu où l'on progresse difficilement , quelquefois même a plat-ventre sous les touffes denses , le pire étant les arbousiers pleins de branches mortes qui vous griffent le visage …

Je ne parlerai pas aujourd'hui des quelques bois de splendides chênes-vert généralement dans le fond des vallons ni des châtaigneraies relictuelles qui abritent souvent un cabanon en ruine .
Non , je vais rester sur le lit de la Verne , les pieds , les jambes , parfois jusqu'à la ceinture dans une eau moirée qui précède la sécheresse de l'été ; laquelle , laissera subsister seulement quelques trous d'eau .

Dans cette rivière abondent les fougères royales , celles qui présentent leurs panicules de spores en bout de tige , comme des bouquets ; fougères d'un vert tendre qui prospèrent sous l'ombre des aulnes ( également appelés : vernes )

J'avance dans le lit de la Verne , en essayant de ne pas glisser et me retrouver assis dans l'eau ! Il y a là tout une végétation spécifique au cours d'eau : des houx , des lauriers , des tiges de salsepareille qui grimpent dans les arbres en se mêlant aux clématites , des frênes au troncs suppliciés par les crues de l'hiver , des aubépines , des nerpruns , des touffes de ronces qui se mélangent aux buissons de myrte et aux fragons avec leur boule rouge au dos de la feuille !!!
Il y a là aussi des bancs de sable doré , des amas de branchages déjà usés par les courants de l'hiver car cette rivière peut avoir un débit considérable !

Par endroits la végétation recule , la Verne coule alors entre des parois rocheuses aux schistes déchiquetés et c'est le domaine des grenouilles et des tortues .
Aussi prudent que l'on soit , elles vous distinguent de loin et vont se réfugier dans l'eau !
Si l'on a un peu de patience , au bout d'un moment , tout ce petit monde vient risquer un œil en surface , mais , même si l'on ne bouge pas , il vous a vite identifié comme silhouette suspecte et replonge aussitôt !

a suivre

dimanche 25 novembre 2018

Schubert-Quintet in C Major op. 163, D. 956 (Complete)

         La Verne

       En ce temps-là le monde était souple et élastique , léger , rapide , changeant ...
       Dans le lit de la rivière je sautais de pierre en pierre ; en équilibre : recherché , perdu , retrouvé comme dans une danse sauvage ... 
      Je respirais de toutes mes forces cet air brûlant et parfumé du maquis des Maures : a cause de la chaleur ,  les piles de mon Nikon avaient coulé !

      En ce temps-là je n'emportais pas d'eau avec moi : je restais des heures sans boire , trompant ma soif avec des aiguilles de pin ,des baies de myrte ou des feuilles de laurier ; parfois , quelle aubaine ! des mures bien granuleuses que leur position haute interdisait aux renards mais pas aux geais qui menaient grand tapage tout au long de la journée !

      C'était :   La Verne  , ma rivière  , a moi seul car je n'y ai jamais rencontré personne d'humain !

      Dans ces fonds rocheux et brûlants , je ne me sentais pas seul , j'étais dans le ventre de la Nature qui déroulait ses merveilles devant mes yeux .
      Je crois qu'alors  , j'étais parfaitement heureux !

  a suivre ... 

mardi 6 novembre 2018

Mondonville: Sonata para violín y clave No. 4 en Do Mayor [Leonhardt & F...

Le banc

  Devant le ruisseau asséché , le vieillard était assis sur un banc.
Son regard se portait sur la pente , a sa droite , où les sécheresses successives des dernières années avaient eu raison des buis et des chênes : c'était donc maintenant une pente caillouteuse piquée de touffes de pèbre d'aï .
  Le ruisseau qui, un peu plus bas, avait longtemps entretenu une source grâce aux pluie du printemps , était d'une blancheur de squelette .
  Ses trois chiens qui ne comprenaient pas l'intérêt qu'il trouvait a rester là s'étaient éloignés a la recherche de sangliers ou de chevreuils .Les sangliers , c'est bientôt tout ce qu'il resterait de vivant sur ce terrain : éventrant la terre ,saccageant les prunelliers et les pommiers sauvages , retournant le sol au pied des pins ...

  Le vieillard n'avait pas bougé et son regard balayait lentement tout autour de lui : qu'attendait-il ?
Les chiens se mirent a couiner a leur façon hystérique dès qu'ils avaient trouvé une piste et les craquements dans les buissons s'éloignèrent .
  Ce petit ruisseau démarrait sa course seulement 400 mètres plus haut , il ne coulait guère qu'après plusieurs jours de pluie mais il pouvait aussi  avoir des crues tout a fait disproportionnées et charrier des galets qui dévalaient alors la pente ...
  Au loin les chiens aboyaient et il ne tentait pas de les rappeler .Il était dans une sorte d'hébétude quand le regard se trouble et que la Nature tout autour pèse de tout son poids et prend possession de l'imprudent qui a arrêté son pas ...

  A le regarder , silhouette immobile ,légèrement penchée en avant , on se demandait ce qu'il attend ?
  Peut-être l'orage qui menace après une journée étouffante ? Et justement le ciel s'assombrit , la lumière devient froide et métallique , un vent se lève qui secoue et courbe les arbres autour de lui ...
Au loin on entend toujours les chiens qui suivent leur piste .
Le vieillard n'a toujours pas bougé , tout au plus un léger balancement d'avant en arrière , tandis que les premières gouttes tombent ...
Grosses gouttes rafraîchissantes après cette journée torride !

   La pluie maintenant s'accentue , ponctuée de quelques grêlons gros comme des billes tandis que la noirceur envahit le jour et que des bourrasques secouent le terrain .
 " Qu'attend-tu vieillard pour aller te mettre a l'abri ? ce n'est plus de ton age de te laisser tremper au risque d'attraper du mal ? Qu'est-ce qui te pousse a rester là tandis que la pluie balaye en rafales ton visage ? "

  Le ruisseau est en train de naître : un mince filet passe devant le banc provenant de la moraine du haut du terrain , souvenir des temps anciens .
 La pluie augmente , elle ruisselle sur le visage et le corps du vieil homme ; elle semble lui apparaître comme une bénédiction , la survie de cette terre , de ces arbres mourant sur le terrain ...

  Et puis brusquement , un déluge s'abat : c'est une malédiction maintenant qui arrache la terre, fait dévaler les cailloux qui roulent dans le ruisseau avec des branches cassées et même un cadavre d'oiseau , un geai qui n'a pas su se mettre a l'abri ; tout autour le terrain ruisselle ...

Le banc ( suite )

 Le vieil homme est maintenant une torche dégoulinante figée dans son immobilité ...

   Le ruisseau grossit encore , déborde autour du banc , enveloppe ses pieds et ses jambes :une eau lourde et boueuse , froide ...

  Et puis une énorme vague soudaine s'abat sur le banc , sur le vieillard et les emporte dans ses flots .


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  Dans une galaxie lointaine , sur une planète isolée : un grand rassemblement .
De la foule monte un murmure :"Il va venir "
Déjà , sur la scène les musiciens sont là : de grands reptiles aux écailles argentées avec leurs instruments d'un autre monde ;le soleil décline et quand la nuit s'installe , les deux lunes rouges montent dans le ciel ...
A ce moment-là s'élève de la foule un chant une musique issue des corps eux-même :" Herr Gott Nun Schleuss' Den Himmel Auf ...